Une virée dans les cailloux… Variations sur le rouge

par | 16 Nov 2010 | États-Unis

Visiter les parcs nationaux de l’Ouest des États-Unis, faisait partie des choses à ne pas manquer pour nous. Ils étaient inscrits dès le départ au programme des réjouissances. Avec le temps et notre configuration, ils nous sont apparus comme infaisables à vélo. Qu’importe, nous les ferons en voiture, il faut parfois savoir ne pas trop se borner et adapter en contournant les lignes que nous nous étions fixées en termes de voyage nature.

Ce n’est d’ailleurs pas la première fois que nous dévions de nos idées décroissantes, mais après consultation de nos consciences, nous nous trouvons assez raisonnables. Ceci n’engage que nous (JR et moi), les enfants faisant partie intégrante du lot familial n’ont pas d’autres choix que de suivre le mouvement mais ils feront ce qu’ils voudront quand ils seront grands… Et puis ça m’étonnerais qu’ils ne soient pas légèrement influencés par le modèle parental

Bon, là je m’égare. Allez moteur en route, on roule.

Sept jours de location, un tour de 1200 miles, une dizaine de sites tous plus exceptionnels les uns que les autres et qui nous font envie, des heures de marche pour profiter de chaque parc, et la nuit qui tombe à 17h, c’est pas compliqué va falloir faire vite et surtout choisir.

Le premier, le plus grand, le seul vraiment connu dans le monde, c’est le Grand Canyon National Park. Nous découvrons qu’il y a deux façons de l’aborder : North Rim et South Rim. North Rim est sur notre route, nous tentons cet accès sachant qu’il est déconseillé après la mi-octobre. Nous sommes le 10 novembre, à mesure que nous montons en altitude le temps se bouche. Nous finissons par abandonner et faire demi-tour avant d’arriver, car à 2700m d’altitude la neige tombe de plus en plus fort. Il nous reste l’accès Sud pour lequel un détour de 215 miles est à faire.

En cette fin de journée, nous roulons vers le sud, dans des paysages absolument fabuleux. Les roches à dominante rouge sont sculptées par l’érosion de l’eau et des vents, les espaces sont immenses. Pédaler dans ce décor invraisemblable aurait été géant, c’est sûr ! L’air de rien, le pare-brise de la voiture coupe la vision panoramique, il faut s’arrêter souvent pour contempler.

Arrêt pour la nuit dans un camping en auto-gestion en plein milieu de Marble Canyon. A cet endroit là, la baignade dans le Colorado est possible (en été bien sûr).

Nous reprenons la route pour South Rim de bonne heure. Le détour permet d’aller chercher un passage à un endroit où le canyon est moins large. À Lee’s Ferry nous arpentons ce pont métallique qu’utilisaient avant 1993 les Indiens Navajos pour traverser le fleuve. Jugé trop dangereux à la circulation, les voitures empruntent désormais son frère jumeau construit juste à côté. Nous avons la chance d’observer un condor, qui nous observe aussi, juste retour des choses, 5 mètres en contre bas.

Traversée ensuite de l’immense réserve des Navajos en Arizona, avant de remonter en altitude dans la forêt pour atteindre South Rim Village à un peu plus de 2000m.

Enfin voila le canyon dans sa partie la plus large, le panorama est à couper le souffle, c’est impressionnant, vertigineux. Les mots ne suffisent pas pour le décrire, il faut y être pour ressentir l’immensité et la beauté du lieu.

Le site est très touristique, nous trouvons facilement des explications sur la formation du canyon, ses dimensions imposantes, sur les différentes couches géologiques. Cette semaine nous zappons un peu le CNED, on ne peut pas tout faire, mais les gamins enregistrent tellement de choses ici, en live, en anglais, qu’on s’en passe sans remord ! Disons qu’ils accumuleront encore un peu plus de retard…

Nous entamons assez tardivement une balade sur le chemin balisé en bordure du gouffre. Y’a du jus et nous ne lâchons pas la main des deux petits, puis nous continuons avec une navette touristique jusqu’au coucher du soleil.

L’installation au camping se fait encore de nuit. Pour ça, les phares de la voiture sont bien pratiques, et nous nous endormons pour la nuit la plus froide de notre voyage. Au réveil, tout est gelé, y compris la condensation sur les duvets. La température est descendue à 13°F, soit -10°C.

Le temps de dégeler la famille et le matériel, et nous repartons vers l’Est en direction de Monument Valley à la frontière des états de l’Utah et de l’Arizona. Et ça nous prend presque la journée, puisque nous arrivons juste à temps pour voir les Monuments éclairés par le soleil couchant. Depuis le tournage par John Ford d’un western avec John Wayne dans la vallée, le site reste l’un des cadres préférés des photographes et cinéastes.

Les buttes et les aiguilles sont les vestiges témoins de l’érosion par le vent et les processus géologiques à travers les millénaires sur le plateau du Colorado. Monument Valley est aussi le centre de toute une communauté d’indiens Navajos qui ont préservé leur traditions, leur propre langue, leurs arts, et leur mode de vie pastorale, basée sur l’élevage de moutons, et leurs rapports traditionnels et harmonieux avec la terre. Aujourd’hui Monument Valley est protégé dans un Navajo Tribal Park (Parc de la Tribu).

Encore une fois, c’est superbe. Malheureusement, nous arrivons un peu tard pour camper sur le site et profiter du lever du soleil en direct. La barrière menant au terrain de camping est déjà fermée.

Nous trouvons un camping au village le plus proche, à Goulding. La nuit est tombée depuis longtemps. Au réveil, nous découvrons que nous avons dormi dans un cadre rouge et ocre.

Au programme du jour suivant, atteindre la ville de Moab au nord ouest de l’Utah, tout en faisant étape au Natural Bridges Park. Nous quittons ce lieu magique, non sans nous retourner une bonne dizaine de fois pour admirer l’éclairage particulier du matin sur les Monuments.

Natural Bridges Park, nous y sommes. Il y a tant de balades à faire, par où commencer ? Nous en ciblons deux, qui nous semblent intéressantes d’après la doc reçue à l’entrée du parc. Le trek complet de 7 heures permettant de longer la rivière et passer sous les plus belles arches n’est pas dans notre timing… et c’est bien dommage.

Les ponts ont été sculptés au fil du temps par le passage de la rivière au fond du canyon.

Il est temps de rejoindre la plus grande ville de ces contrées avec ses 5500 habitants. Moab, ambiance jeune et sports de montagne, mais pas « fils à papa » et « m’as-tu vu », c’est plutôt tranquille et zen, vous voyez de quoi je parle ? La ville est située non loin de Arches et Canyonland

La journée est finie, Arches National Park attendra demain. De toutes les façons, compte tenu des nombreux treks possibles, il nous faut la journée, à minima. Nous avons une pensée pour Scott et Stacy d’Alberta qui viennent régulièrement passer leurs vacances ici.

Cette région de roches rouges et ocres, qui changent de couleur avec le soleil, regroupe le plus grand nombre d’arches et autres formations rocheuses au monde. Environ 500 arches qui résultent de 150 millions d’années d’action combinée des cours d’eau, du vent, de la pluie, du gel et du soleil.

Le parc est divisé en cinq parties reliées par 34km de route praticable en voiture. Nous avons essayé de faire une ou deux balades pour chaque zone, mais les plus longues ont été systématiquement mises de côté. Les cinq parties sont dans l’ordre de passage : L’entrée du parc « Park Avenue« – The Windows Section – Delicate Arch – Fiery Furnace – Devils Gardens area, avec des formations géologiques qui sont bien représentatives du nom donné. Nous ne pourrons pas approcher Delicate Arch, l’arche la plus renommée des lieux et symbole de l’Utah. La randonnée fait presque 5km aller, no comment.

Une aire de camping est située un peu avant Devils Garden. Il ne fait pas encore nuit, nous décidons de remettre au lendemain le reste de la visite et de nous y poser afin de profiter un peu de ce lieu magique. Nous choisissons un site dans les rochers, les enfants sont super contents. Il y a là, de quoi gambader, escalader, glisser et se défouler, comme dans un véritable parc d’attractions. Après ces kilomètres et kilomètres enfermés dans une voiture, c’est l’euphorie ! C’est qu’ils n’ont plus l’habitude d’être contenus, après presque six mois de vie au grand air. On comprend pourquoi Roy et Claire (les enfants de Scott et Stacy, vous suivez toujours ?) préfèrent venir ici plutôt qu’à Disneyland !

À 1700m d’altitude, la nuit fut froide. Au matin, alors que nous essayons de nous réchauffer avec du thé brulant, qui voit-on arriver ? Claire et Roy, suivis de leurs parents, qui ont reconnu nos tentes. Ils étaient installés à seulement quelques emplacements de nous. Quelle surprise ! Aussitôt les gamins partent jouer ensemble dans le décor, tels de vrais chamois pendant que les parents papotent des derniers mois passés. Maëlle récupère le petit vélo de Claire, et refait quelques tours de pédale sans filet.

L’appel de la route, il est l’heure de repartir. Au revoir les amis, cette fois je ne sais pas si on se recroisera un jour, mais nous garderons tous un bon souvenir de nos rencontres.

Arrêt à peine plus haut, pour papoter un moment avec Gilles, Sylviane et leurs deux enfants Arthur et Adrien, des français du sud ouest, partis d’Halifax pour rejoindre Panama en combi VW.

En ce début (bien entamé du reste) de 6ème jour, retour sur Moab sous la pluie pour s’offrir un moment de répit dans un café tout en essayant de réfléchir à l’optimisation du peu de temps restant… Ô temps, suspends ton vol…

Coupes franches obligées, d’autant que l’on se trouve complètement à l’opposé de l’État de l’Utah par rapport à St George, nous prenons la sage (?) décision de rentrer en passant par Bryce Canyon, à un jour de route, puis finir par Zion, peut-être.

On roule toute l’après-midi, dans des paysages de tout beauté, un col à 9300 pieds, de la neige, Boulder, Escalante où l’on se pose, il fait déjà bien nuit.

Enfin Bryce Canyon National Park, après une montée dans une forêt de pins, on découvre en approchant du bord du canyon un panorama grandiose. Le spectacle est tout simplement géant. Nous nous cantonnons d’abord à quelques postes d’observation au dessus des « amphithéatres » composés de hoodoos aux tons orangés. Puis nous nous autorisons une petite randonnée, descente aérienne tracée dans le canyon au milieu de ces piliers de roches en équilibre.

Pour finir, Zion National Park, dont nous parcourons uniquement en voiture la route scénique le long de la rivière Virgin au fond du canyon.

Retour tardif chez Dace où sont restés nos vélos, des images plein la tête de ces merveilles de la nature. Nous apprécions le confort de la chambre d’amis et la soirée debriefing avec lui. Pour nous éviter les 120 miles de désert, Dace nous propose un lift vers Las Vegas dès le lendemain, nous acceptons volontiers. Un grand merci à toute la famille pour ce super accueil !

Bilan de la semaine : tous les superlatifs sont bons pour exprimer toute la splendeur et la grandeur de ces paysages. Nous en avons pris plein les yeux, autant de moments inoubliables vécus en concentré dans une semaine. Les enfants ont incontestablement préféré Arches, certainement pour l’aspect ludique, Bryce m’a inspiré et amène à la contemplation.

Mais… On peut dire que nous avons couru, sentiment de déjà vécu, on se rappelle Yellowstone en une journée. Un grand regret, de n’avoir pas pu rester plus longtemps dans chacun des parcs, d’avoir dû faire un choix et zapper quelques autres merveilles, notamment Antelope Canyon, Paria Canyon, Canyonland, Capitol Reef, Lake Powel, death Horse, Mesa Verde et bien d’autres… Bien sûr l’idée de prendre deux, trois semaines de « vacances » dans le voyage nous avait effleuré, sauf que… le temps, le budget…

Pour finir, juste un petit conseil à donner, il est absolument nécessaire de prévoir un minimum d’une journée pour chaque parc, voire même plus pour approfondir la visite si on aime marcher.

MC