Retour sur les mois passés aux États-Unis, peu de temps disponible pour mettre à jour le site, les journées sont très courtes et nous devons boucler la journée au moment où quelqu’un éteint la lumière du soleil… de plus en plus tôt… Ces temps-ci c’est plutôt vers 16h30 !
Il était prévu de passer par les belles routes à partir de Yellowstone Park, plutôt perchées et difficiles. Mais le temps pressant, nous décidons, encore une fois, de changer notre itinéraire. Nous passons au plus facile c’est à dire moins haut pour avoir moins froid et pour aller plus vite. Car je vous rappelle que l’hiver nous court après depuis un certain moment. Nous décidons de tracer droit par la plaine jusqu’à Salt Lake City, tant pis pour Grand Teton National Park dont nous devinerons au loin les montagnes et tant pis pour le passage clin d’oeil à Montpelier et Paris, puis droit vers St George, enfin presque parce que la Freeway 15, on évite.
La route n’a rien de passionnant, droite au milieu d’une large vallée, plate ou presque, accotements parfois inexistants ou très mauvais et dangereux. Routes de l’Idaho, puis Utah, même combat. Heureusement que nous rencontrons des gens sympa, comme à Rexburg, où une dame nous arrête dans la rue pour nous demander si on sait où dormir. Ben pas encore, et ni une ni deux, nous voilà en file derrière sa voiture jusqu’à sa maison. Judy et Burdette nous laissent planter la tente sur leur grand terrain puis nous offrent des légumes du jardin qui améliorent notre plat de lentilles.
Plus loin, à Pocatello, c’est Syndee et Dough, fils de J. Guthrie candidat aux élections de la chambre des représentants, qui nous ouvre son jardin puis sa maison et propose la caravane pour les enfants.
Les matins sont glacials, la tente est gelée et cela demande du temps pour tout remballer dans une lenteur engourdie. Heureusement que ces derniers jours, le soleil est de retour et nous accompagne.
A l’approche de Salt Lake City, les villes se densifient. Nous traversons des immenses zones commerciales avec de temps à autres, une ferme en plein milieu, des vaches ou chevaux d’un autre temps.
Arrêt à Logan, chez Loren et Harold contactés par avance sur le site des warmshowers. Nous plantons la tente au fond du jardin, près de la rivière et nous rentrons à l’intérieur pour le reste de la soirée, passée à cuisiner et à papoter de vélos et de maison en bottes de paille. Harold a traversé les Etats-Unis avec un fixed-gear, possède un VTT avec des pneus particulièrement larges pour rouler sur la neige. Ils sont bien cools. En plus, on repart avec un contact pour Salt Lake City, Lisa qui nous attend de pied ferme.
Nous avons encore un bon col à grimper avant d’atteindre la grande ville. La route est large mais le trafic ne cesse pas. Thomas est un as, particulièrement dans les montées, mais difficile d’en finir avant la nuit. Nous demandons notre chemin pour le prochain camping et Norman nous propose son jardin. Norman et Kris sont retraités et habitent dans une superbe maison en rondins de bois. Nous passons une agréable soirée en leur compagnie.
Le lendemain, en cherchant un camping qui n’existait pas, nous posons nos tentes chez Jo et Karen. Nous discutons jusqu’à tard et Jo nous propose un lift pour nous éviter la dernière très longue étape car la pluie est prévue. C’est sous une pluie battante et à l’abri d’un camion, que nous faisons en une heure de temps, ce que nous aurions dû parcourir en une longue journée. Ce qui nous laisse du temps pour déambuler dans le centre de Salt Lake et se faire mouiller ! Et évidement, c’est dégoulinant que nous débarquons chez Lisa. La météo des jours suivants n’est pas vraiment meilleure et elle nous propose de s’installer comme on peut dans son petit appart. Nous sommes finalement restés quatre jours chez Lisa. Le squat était bien inspiré, car nous avons évité une bonne tempête de grêle et de neige ! Vraiment très cool, entre son travail de photographe et ses activités hippiques, elle nous a laissé les clefs de sa maison. Nous avons partagé quelques bons moments avec elle, dont l’anniversaire pour les 11 ans de Mallori.
Durant ces quatre jours, nous avons bravé le froid et le mauvais temps pour sillonner cette grande ville entre cafés, bibliothèque, visite de Temple Square dont le tabernacle et son orgue géant, le fameux temple Mormon dans lequel on ne peut pas entrer et la bibliothèque généalogique. Salt Lake est la ville de référence pour les Mormons tout comme l’état de l’Utah. Hormis l’aspect religieux auquel nous n’adhérons pas forcément, nous retiendrons qu’ils sont très accueillants et très portés sur la famille.
Après SLC, c’est décidé. Y’en a marre de cette route large et droite de vallée, nous nous écartons légèrement sur l’Est, dans un paysage un peu plus champêtre, avec l’espoir d’atteindre assez rapidement St George à la frontière de l’Arizona où Dace et sa famille nous attendent et où la météo annonce 20°C.
Mais on a beau se dépêcher, l’hiver nous rattrape et à peine sortis de l’agglomération de SLC, nous voilà au petit matin, avec 10cm de neige fraiche sur les tentes et les vélos, premier manteau de neige de la saison. On peut dire que nous avons eu une chance phénoménale cette nuit là, en découvrant au lever, une énorme branche chargée de neige lourde, tombée pile entre les deux tentes dans un craquement sourd. Rien de cassé, personne d’assommé, bien évité en somme. Après coup, je me suis souvenue de la dernière phrase de la dame qui nous avait ouvert son jardin, un peu sceptique et pas très bavarde, nous souhaitant bonne chance.
Une fois tout plié, les mains gelées, nous filons vers un café de la zone commerciale pour réfléchir à la situation. Le soleil revient et fait rapidement fondre la neige, la météo prévoie du beau temps pour les jours suivants. Nous tergiversons un moment sur la meilleure option à prendre jusqu’à St George et nous continuons sur notre idée de départ. On risque d’avoir un peu froid, mais la route en vaut la peine car on pense redescendre sur St George par Zion National Park (I’m gonna be Iron like a Lion in Zion (repeat) Iron Lion Zion…)
Et c’est rien de le dire, tant que nous serons à ces altitudes, en moyenne 1500m, nous aurons de plus en plus froid, particulièrement la nuit, car en journée le pédalage réchauffe bien. Même Maëlle, est bien protégée dans sa roulotte, elle se récupère au cours de la journée les couches de vêtements que nous tombons un à un dans l’effort. Doudounes, polaires forment un cocon bien douillet pour la princesse qui se déshabille tellement elle a chaud ! Elle enchaine les siestes, remplit son cahier de dessins et d’écritures patiemment et préfère jouer avec ses cailloux et cartons récupérés plutôt qu’avec ses petits jouets.
Journée mémorable pour nous en ce 30 octobre. Elle commence au camping de Provo, Utah, où un couple d’Allemand en camping-car nous offre un véritable trésor : un carton rempli de victuailles qui tombent pile-poil. Le petit dej s’annonçait frugal, il sera gargantuesque ! Tant mieux, la journée risque d’être longue.
A peine 15 km plus loin, opération provisions à l’hyper qui passait par là… non, c’est nous qui passions par là. Julie, Mallori et Thomas restent près des vélos. C’est là qu’entrent en scène Serge et son fils Enzo attirés vraisemblablement par le drapeau français.
Dialogue confus et rapporté en choeur par les enfants tout excités dès notre retour :
Serge : « Where do you come from ? »
J+M+T : « From France »
S en aparté à son fils : « Which city do you know in France ? »
S : « Et vous, vous êtes d’où en France ? » remarquez le passage au français
J+M+T : « De Saint-Égrève à côté de Grenoble »
S : « Ah ! ma femme est de Brié-et-Angonnes ». Tout de suite ça crée des liens
» Et vos parents, où sont-ils ? »
J+M+T : « Ils font les courses, ils ne vont pas tarder »
S : « Ben, venez manger à la maison, ce n’est pas très loin »
S : « J’emmène les enfants à la maison et je reviens vous chercher tout de suite », on ne sait pas pourquoi, mais cette phrase là restera à jamais gravée dans les mémoires. Régulièrement, les enfants se rejouent la scène : « Qu’est ce qu’il a dit Serge ? »
Le temps de ranger nos courses et nous retrouvons Serge et Enzo qui a voulu prendre son vélo pour faire le chemin avec nous.
Nous faisons connaissance avec Elodie, la maman et les deux petites filles Chloé et Margot. Tout de suite nous accrochons bien, les petits jouent ensemble. Une grosse averse de grêle aidant, Elodie nous propose de rester à dormir le soir. D’autant que ce soir, la majorité des enfants du quartier fête Halloween en avance, car on est samedi. Quelle aubaine ! Cela fait pas mal de jours que les enfants rêvaient de s’arrêter dans une famille pour le 31, au pays de la citrouille, il ne fallait pas rater ça. Depuis plusieurs semaines, nous sentons le pays en effervescence pour préparer cette fête, il y a de la recherche dans la décoration de la majorité des maisons.
A Springville, les opérations de déguisement vont bon train, et malgré la pluie, le Trick or Treating ravit les petits, et le butin de la tournée est si important qu’il permettra d’alimenter les petites fringales des prochaines semaines.
Serge propose une mission aux enfants, celle de porter des bracelets aux cousins de Brié. Les bracelets auront vu du paysage et seront le témoin de notre passage à Springville. Défi accepté par les petits Aubertein… à suivre.
Nous repartons le lendemain, après un passage éclair sur invitation dans leur église pour les célébrations du dimanche. Au moins on aura une idée de ce que sont les célébrations Mormones.
Les jours se suivent et ne se ressemblent pas, fort heureusement d’ailleurs. Mais voilà qu’aujourd’hui, le lieu de notre pause déjeuner est bien mal inspiré. Au moment de repartir, une crevaison puis deux, puis trois, ce seront en tout cinq crevaisons en l’espace de 100m qui nous immobiliserons plus d’une heure ! Les habitants de cette petite rue de Salem sortent peu à peu, pour nous proposer de l’aide, ici un compresseur, là un bout de craie (très utile pour repérer le trou), à boire, à manger, un contact pour la suite ou tout simplement pour papoter pendant que les hommes s’activent autour des vélos démontés. Certains garderont contact avec nous par mail.
Harold de Logan nous avait pourtant prévenu de faire attention aux bas-côtés, où se trouvent des plantes sèches pleines d’épines sournoises. Fallait expérimenter pour comprendre, mais même en faisant attention, la suite nous réservera quelques bonnes crevaisons !
Et on avance, on avance. Les matins sont froid, autour de 0°C, le soleil est avec nous en journée, nous avons retrouvé les montées (et les descentes) sur la route 89, les arrêts crevaisons sont énervants, le vent forcément de face, arrêts bibliothèques pour travailler un peu quand même. Nous fêtons l’anniversaire de Thomas avec un vrai gâteau américain, un cheesecake aux pommes, chez Kirby et Tawnie qui nous ont invités. Peu à peu les paysages se colorent : jaune pour les feuilles, rouge pour les cailloux, verte pour la route 😉 ; nous suivons avec intérêt les prévisions météo locales, plus que quelques jours de répit avant la neige… Faut passer ce dernier col à 7454 pieds avant de redescendre sur Zion et St George, on n’a pas le choix.
Il est des jours où l’espoir renaît ! A Marysvale, reste 74,5 miles pour atteindre le col et un bon dénivelé positif, soit un minimum de 2 jours même en poussant Thomas. Coup de chance nous croisons le propriétaire du seul camping du village qui est fermé. Celui ci nous autorise quand même à planter la tente. Un peu inquiet pour le froid et un peu intrigué par notre convoi, il repasse nous voir et nous propose un des cabanons. Au fil de la discussion, Malo (c’est son prénom, bizarre un breton par ici) nous apprend que la neige arrive demain soir et nous propose un lift en truck jusqu’à St George. YES ! Ça ne se fait pas de refuser, là on était bel et bien coincés !
Voilà comment nous sommes arrivés à St George, merci Malo ! 17°C la nuit, il commence à pleuvoir… Hé hé, il doit neiger en haut !
Nous recontactons Dace, du site warmshowers, plus tôt que prévu. Qu’à celà ne tienne, nous sommes les bienvenus. Sitôt arrivés, il nous présente sa famille, Laury sa femme, Alexa, Cecilia et Kyre ses trois enfants. Tous sont très sportifs et très occupés. Nous sommes accueillis comme des rois, la chambre d’amis et le repas nous attendent. Dace est fan de vélo, plutôt en sorties à la journée. Il projette de faire la Route 1 le long du Pacifique, en cyclotourisme, un de ces quatre. Il est aussi prof de géographie au collège et aimerait nous présenter à sa classe pour leur parler du voyage et de la France, pays si petit et si lointain pour eux.
Dès le lendemain matin, nous rejoignons le collège à vélo pour l’heure dite. C’est dans un amphi que nous sommes accueillis par deux classes qui nous attendent de pied ferme avec un tas de questions. Julie et Jean-Roch font le show, en anglais évidement avec quelques apartés en français, ce qui amuse bien les élèves. Pendant ce temps, Dace diffuse sur grand écran notre site internet et recentre parfois les questions sur l’aspect géographique. Tout le monde est satisfait de l’intervention et nous repartons à vélos pour visiter la ville. Nous en profitons aussi pour réserver une voiture de location car nous partons dès le lendemain en visite dans les parcs nationaux de l’Utah et de l’Arizona.
De retour le soir, nous passons la soirée avec nos hôtes. Dace nous aide à établir le programme des visites pour la semaine à venir. Au passage, il nous apprend qu’il est tombé deux pieds de neige (quelque chose comme 60cm) à Marysvale et que c’est un des endroits les plus froids du pays. Ouch ! Nous avons rencontré Malo au bon moment.
MC


